Sylvie lín jìng, la Princesse d’Air France de Shanghai
Posté par ITgium le 25 novembre 2012
Quatre nouvelles De Francois de la Chevalerie et Anmandae de Leira
(1) La princesse de Shanghai
(2) Les larmes de Suzhou
(3) Le conciliabule des amants
(4) De l’amour entre un homme occidental et une femme chinoise
(1) La princesse de Shanghai ou comment être une femme chinoise à l’esprit limpide.
Voici quelque temps, dans la mêlée de la vie, un ami lâche une incidente :
- Pour connaître Shànghǎi, il te faudra déchiffrer le regard d’une femme. Derrière l’apparence, les jeux de rôle, le superflu, une beauté assurée, se cache dans les entrelacs de son âme, un brin de paradis, une ville aux lumières éternelles.
Il ajoute d’une voix émue :
- Nul autre qu’un homme amoureux n’en fera meilleur usage.
Fort du conseil, dès le lendemain, d’un pas résolu, je me lance à l’assaut de la perle de l’Orient, la parcours de long en large, m’en allant vers le Wai Tan, poussant jusqu’à l’Observatoire de Sheshan, au sommet de la colline de So Zé.
Courant, haletant.
Osant l’aventure dans les rues les plus sombres.
Prolongeant ma route vers de beaux édifices, témoins d’un passé glorieux.
Sur le chemin, je frôle des femmes.
Grandes ou petites, replètes ou chétives. L’œil borgne ou le regard vif.
Toutes chinoises, supposées Shanghaiennes.
Du cru, d’un beau cru.
D’un geste, je les approche.
D’une voix chaleureuse, je quémande une minute de leur vie.
Ou un simple sourire.
Je les observe jusqu’à les dévorer du regard.
Traquant le moindre trait, guettant chaque nuance, à la recherche de l’improbable onde.
Malheureusement, ce jour-là, les perles sont rares.
Pâle constat !
Comment cette femme au regard si fade peut-elle abriter la face cachée d’une ville ?
Comment cette autre, désespérément amorphe, m’en dévoiler les secrets ?
L’âme de Shànghǎi m’échapperait-elle plus longtemps encore ?
La nuit tombant, je baisse les bras.
C’est alors que devant le Renmin Gōngyuán, je remarque une ombre glissant le long de l’étang aux lotus. Une silhouette élégante et fine s’en allant rapidement. La voilà maintenant sur Nanjing Lu, s’élançant d’un pas volontaire, traversant le croisement d’un seul tenant.
Une marche presque militaire l’emmène vers le Ciro’s plaza.
Je la prends alors en filature, la double sur la gauche, bloque son passage.
Lutte étrange, mon corps s’oppose au sien.
La nuit est opaque. Des bruissements de voiture aux alentours. Quelques clameurs au loin.
Son visage est sobre, aux traits harmonieux. Une peau légèrement chahutée par une pigmentation désordonnée.
Elle lève lentement la tête, me foudroie du regard, jette une moue dans l’arène. Enfin, elle s’exclame :
- Vous n’avez rien compris ! L’âme d’une chinoise ne s’acquiert pas sur une fausse détermination.
Surpris, je la laisse passer.
Elle file de nouveau, plus rapidement encore.
Je reprends ma course, à son niveau maintenant.
- Mademoiselle, pouvez-vous me parler de Shànghǎi ?
Elle s’emporte alors.
Une remontrance, un cri de colère.
Une avalanche d’épithète censée chasser l’intrus.
Puis un silence.
Soudain, surgissent des larmes.
Elles glissent sur ses joues, chahutent ses lèvres.
Dans un éclair, un sourire.
Emmené par un mot léger. Une étoile dans le ciel. Un vœu pour la vie. Une envie sincère d’aimer, d’être aimé.
Désormais sereine, elle raconte un quartier, une anecdote, l’Histoire de Shànghǎi.
Ci-git, sous des pierres, un homme illustre ayant construit plus d’une bâtisse.
Là-bas, un aventurier au long cours, chercheur d’or.
Se dissimulant sous les arbres, l’amour fou et désespéré entre une française de bonne famille et un bandit de Chóngqìng.
Se brisant à jamais la vie d’un jeune français passionné d’écriture chinoise, le malheureux, écrasé au petit matin par un chauffard sur Nanjing Lu.
Malheureuse, cette toute jeune fille, née de l’amour éclair entre un homme noir et une chinoise, à la recherche de son père dans un bar glauque aux abords du temple de Jing’an.
Au loin, résonne la triade Xiăo dāo hui, la Société des Petites Épées.
Hurle son parrain, Du Yuesheng, surnommé Du les Grandes Oreilles, personnage ubuesque, meneur de trafics en tous genres.
Bruit aussi la grande Histoire.
Les vivats des membres fondateurs du Parti communiste chinois (Zhōngguó Gòngchǎndǎng) le 23 juillet 1921 dans la concession française (fǎzūjiè).
Misérables, les Hóng wèi bīng, grotesques gardes rouges, chantant la wénhuà dàgémìng, la révolution culturelle et ses millions de morts.
Heureux, mille fois heureux, des juifs réfugiés d’Autriche, de Pologne et de Russie, en 1940 dans le ghetto de Hóngkǒu !
Ils disent merci à la Chine éternelle de leur avoir sauvé la vie.
Ils s’agenouillent, prient, la main enroulée dans un Sefer Torah.
A l’ombre des souvenirs, le monde moderne, des gratte-ciels, toujours plus hauts, pullulant à Pudong, caressant le ciel.
Sur le toit de l’un, un homme.
Sur le toit de l’autre, une femme.
Au milieu, le vide.
Pourtant, un fil invisible les relie, telle une promesse.
Au fil des récits, je réalise ma chance.
L’âme de cette femme compose avec Shanghai, s’enlaçant, s’aimant.
Deux dans l’un.
L’un dans le regard de l’autre.
L’un s’émerveillant de l’autre.
C’est donc elle, ma muse !
Rassuré, je pars à sa conquête, demande son nom.
Court un silence.
Je renouvelle l’appel, l’entoure de mots amicaux.
Elle se redresse, regarde le ciel comme pour fuir mon regard, mumure enfin :
- Sylvie lín jìng
Une civilisation cinq fois millénaires à l’ombre d’une forêt dense où s’emmêle un zeste de France, telle une chanson.
Originaire de Fuzhou, depuis longtemps arrimée à Shanghai.
Un ancrage durable, indéracinable, « mieux qu’un homme dans mon sillage », dit-elle malicieusement.
Elle raconte alors sa vie de femme, cadencée et mouvementée.
Vigoureusement moderne jamais insouciante.
Des rencontres, des poèmes, une promenade sur un vieux pont, un baiser à l’arraché et puis brusquement se meurt une passion trop lourde à porter.
Tel un retour en arrière pour revenir aux sources, celle d’une ville follement aimée.
Ils n’y pourront rien ces gaillards ! Ni leur adresse, ni leur ingéniosité ne sauront faire fléchir la belle.
Liu, le notable, plouc jour et nuit, roulant dans une berline argentée.
Paolo, le Romain, chantant un ton trop haut « ti amo » d’Umberto Tozzi, le buste en avant.
Un lǎowài originaire d’Atlanta calmant ses nerfs du bout de ses lèvres.
Bu Nong, l’éternel rêveur cosmique, faisant sonner les clochettes de lijiang.
Jeroen, l’Hollandais, grand de taille et bel homme, pêchant la rascasse à Middleburg.
Soudain, une inquiétude chevauche son regard.
Le souvenir d’une querelle, d’une contrariété, juste d’une moue.
Avec l’un, avec l’autre, elle ne sait plus.
Des scènes de vie, un zeste de violence.
Sur les bords du Huángpǔ Jiāng, une après midi pluvieuse du mois de février, des commentaires sarcastiques.
Longeant Shanxi Lu, un terrible chahut, une sinistre affaire d’argent née dans l’univers vulgaire et ostentatoire du Banyan Tree de Hangzhou.
Au pavillon mexicain de l’exposition universelle, une fatigue suivie d’une dispute, d’une fuite et heureusement de retrouvailles.
Des cris à faire frémir le monde entier, au nº 50 de la rue Moganshan. Beaucoup de larmes, ce jour-là !
Des gifles à la pelle devant une agence immobilière dans le district de Pǔtuó Qū. La honte infinie d’un homme agressé en pleine rue.
Misérable accueil à Pǔdōng, l’une fois la tête maussade, l’autre fois la tête en colère.
Une ballade en vélo au Shìjì Gōngyuán, le ventre à l’air.
Sombre ce monde d’infortune.
Le sentiment d’une occasion ratée, celle d’aimer pour la vie.
Sylvie lín jìng m’offre son passé, son présent, son futur.
Sans fard, sans détour.
De la matière brute.
Des mots ciselés, sans mensonge, venant naturellement.
Une femme profonde et sensible, nullement tiède dans ses sentiments, gardant la mémoire de chaque instant, portant la réflexion au loin.
Sous l’effet d’ondes bienfaisantes, vivant honnêtement.
- Puisque aujourd’hui le destin m’a permis de vous rencontrer, demandai-je alors, dites moi seulement ce que je dois faire pour me faire aimer par Shanghai ?
- Ne rien dire qui n’interrompe sa course vers des lendemains heureux !
Elle me tend la main, s’empare chaudement de la mienne et soupire.
- Je vais maintenant regagner mon bureau, le siège d’Air France à Shanghai.
Cette fois, je laisse le passage, regarde sa silhouette s’éloigner lentement. Gracieusement, elle disparait à l’horizon.
L’âme de Shanghai est le meilleur cadeau que Sylvie lín jìng m’ait jamais offert, une part de sa lumière.
Là, dans l’ombre, j’aimerai toujours Shanghai, le cœur heureux d’une si belle rencontre, ce bonheur.
François de la Chevalerie, décembre 2012
Un jour, Sylvie Lin Jing pleure…
Les larmes de Suzhou
- Regarde Sylvie droit dans les yeux, proclame Jay. Lorsque s’annoncent ses larmes, tu assisteras alors au plus merveilleux spectacle qu’il m’a été donné de voir en Chine.
Plus beau que la percée de l’automne dans la Vallée de Jiuzhaigou.
Plus saisissant que la forêt d’Osmanthus à Guìlín.
Plus imposant que la montagne Yulong à Lìjiāng.
Plus impénétrable que le Tǎkèlāmǎgān Shāmò.
Le lendemain, j’invitais Sylvie à Suzhou, terre du lait et du miel.
Une journée du mois de juin, ensoleillée et paisible.
Pour l’occasion, Sylvie portait une robe blanche immaculée comme un hommage à la vie.
Sous le coude les romans de Lu Wenfu, nous avons arpenté les ruelles, enjambant les 160 ponts de la ville.
Le déjeuner venant, nous avons fait halte dans un restaurant traditionnel installé dans un vieux temple aux portes en bois rouge.
Dans une vaste salle, des familles chinoises au grand complet, fêtaient gaiement de véritables agapes.
Un chahut convivial, du bien être.
Sylvie pose son regard sur le menu, choisit les plats locaux, un Biluo Xiaren, un Xigua Ji et une soupe bien appétissante.
Le serveur prend la commande.
Soudain, un flot de larmes se répand sur son visage.
Qu’ai je fait pour lui suggérer une telle peine ?
Je cherche une réponse en l’observant intensément comme pour démêler les fils d’une histoire que je ne comprends pas.
Son visage chavire peu à peu dans une insondable tristesse.
Les larmes se répandent, bientôt occupent tout son visage.
Autour de nous, le silence.
Tous les regards se portent sur Sylvie, attendent un sourire.
Toutes les familles sont tétanisées par sa peine.
Désormais immobilisés, les serveurs retiennent leur souffle.
Je pose alors ma main sur son front.
S’accommode sur mon visage de la compassion.
Elle pleure toujours, des larmes en abondance sur ses joues.
Dans un élan, je lui murmure mon amour.
- Pourquoi pars-tu ce soir ? Peut être pour ne jamais revenir ? s’exclame-t-elle d’une voix ombragée.
Pour ma défense, je parle confusément, une volée de mots inaudibles.
Une urgence à l’autre bout du monde m’attend.
Un argumentaire dérisoire.
Une main se pose sur mon épaule.
Le Directeur du restaurant venu à la rescousse.
- Pourquoi faites vous pleurer votre amie ? demande-t-il.
- Qui êtes vous Monsieur pour faire tant mal à une si belle femme ? interpelle une vieille dame au visage centenaire.
- Quelle arrogance, cet homme là ! renchérit une autre dame.
- Ces yáng guǐ zi nous ont imposé naguère les traités inégaux, la déchéance de notre pays millénaire, ne voilà-t-il pas qu’ils poursuivent leur scélérate ambition avec nos femmes ! tonne cette fois une voix d’homme.
- Envoyez le dans un láodòng gǎizào ! Claironne un autre.
La salle applaudit, se gave d’un slogan : “Out of China!“
Je me lève alors.
Je me retire lentement à reculons, le regard fossilisé sur elle.
Cette fois, ses mains cachent son visage.
Ses cheveux arrosés de larmes.
Dans le restaurant, tous les regards se portent sur moi, entre condamnation et haine.
Maintenant dans la rue, j’appelle le premier taxi.
Direction, l’aéroport de Pudong.
D’un seul tenant.
Cette fois, une larme atteint mon visage, des frissons.
Une pensée.
Comment puis je rester une seule seconde de plus en terre de Chine après avoir infligé une telle douleur à une femme ?
François de la Chevalerie, décembre 2012
Le conciliabule des anciens amants, le cas Sylvie Lin Jing
Ils s’appellent Paolo, Jay, Jeoren, Bunong et René.
A eux seuls, ils jonglent avec cinq nationalités.
Cinq cœurs d’homme âpres au combat.
Au hasard de leur destin, ils ont rencontré Sylvie Lin Jing,
Leur chinoise, disent-ils de concert.
Un ange passant par là, douce lumière, ce temps heureux.
Sylvie, une belle femme lettrée et élégante.
Elle les a accompagnés chacun dans leur désir de Chine telle une ouverture sur un monde souvent méconnu.
A Londres, à Harrods, sur Brompton Road dans le quartier de Knightsbridge, ils se sont retrouvés.
Ce qu’ils disent de leur première rencontre avec Sylvie
- Je l’ai connue en un coup de vent entre deux avions, moi, m’en allant vers Atlanta, raconte Jay. Elle, vers Shanghai. Sur son seul sourire, je l’ai aussitôt aimée. Deux mois après, je rejoignais la Chine, un pays où je ne m’étais jamais rendu auparavant. J’avais dans ma sacoche une bague de fiançailles achetée chez Tiffany & Co à New-York et déjà dans ma tête l’idée du mariage à Atlantic City.
- Comme je passais devant la Fontaine de Trevi, je l’ai rencontrée, se souvient Paolo. Le regard très inspiré, elle semblait se nourrir d’une imagination invraisemblable. Que regardez vous de si beau ? ai je demandé. Anita Eckberg ! A-t-elle répondu. Je l’ai alors entrainée toute la nuit durant dans les rues de Rome.
- Elle a épousé mon regard lors d’une rencontre chez des amis à Shanghai, précise Jeoren. J’ai tout de suite senti qu’elle était prête à la plus belle aventure de la vie, l’amour.
- Une soirée sans nuage à l’ombre de la montagne Meili culminant à 6000 m d’altitude, nous avions l’œil sur Vénus, dit Bunong. Six heures à l’horloge, l’astre crâne dans le ciel ! Plus loin, Jupiter, l’œil moqueur, balayé de mille couleurs. Dans la ronde, ses filles, Europa et Ganymède. Soudain je m’élance, je m’empare de ses lèvres, doux vent de l’ouest, température clémente.
- Je suis un habitué du Renmin Gongyuan, précise René. Je cherche l’âme sœur, en vain, depuis deux ans. Finalement, j’ai souscris au service d’une sorcière maléfique, un modèle de méchanceté et d’aigreur. Pourtant grâce à ses bons soins, je l’ai rencontrée dans un restaurant de Shanxi Lu. Ma belle fée !
Puis le voile se fend.
- Complicated and nervous ring a bell, dit Jay. Un mois après mon arrivée à Shanghai, j’ai plié bagage. Je me suis installé à Pékin où j’ai vécu ensuite très heureux.
- Combien de fois depuis le premier jour de notre rencontre, raconte René, ne m’a-t-elle pas signifié qu’elle allait rompre avec moi ? Pourquoi devrais je m’investir dans une femme qui ne sait pas ce qu’elle veut, une femme qui change d’opinion quand bon lui semble ?
- La nuit tombée, sous les étoiles, commente Bu Nong, j’oubliais ses emballements, son caractère abrupt. Vous savez, le vent frais de Lijiang chasse les mauvaises ondes.
- Alors que j’étais tout doux, tout bon, se rappelle Paolo, elle me harcelait au téléphone, m’appelant cents fois dans l’heure. Je n’avais plus que ses criailleries dans ma tête, plus jamais le son du bouvreuil pivoine que j’entends depuis dans mon enfance à l’ombre des Apennins.
- Avec elle, poursuit René, j’ai souhaité maintenir une distance, telle une sorte « de service minimum ». Pas de cadeau, peu d’attention, peu de geste. Mieux vaut jauger la pièce avant de confier son âme !
- Si elle est célibataire encore à ton âge ! suppose Jeroen. C’est qu’il y a malaise en la demeure ! Je le lui ai dit. Elle m’a aussitôt giflé.
- A chaque fois que j’arrivais en retard à un rendez vous, poursuit Paolo, c’était un déferlement ! Un jour, sur le chemin de Xītáng (西塘) une petite ville chinoise située au sud de l’embouchure du Yangzi Jiang, elle a fait valser ses mains sur mon visage, me mordant aussi les mains. Je suis arrivé à destination, défiguré, les oreilles décollées.
- A chaque fois que je prenais mon élan, tout plein du désir de l’aimer, ajoute Jeoren, elle me réprimandait. Comment faire alors ?
- Avec elle, à un moment d’intense douceur peut suivre un éclat, une tornade, complète Paolo. C’est comme la mer des Sargasses, l’on vit le bonheur éternel et vient la fin du monde !
La chute
Tous à leurs souvenirs, le visage de ces hommes se noie subitement dans une profonde tristesse.
N’ont-ils pas pris conscience d’avoir manqué le coche ?
N’était-elle pas la femme tant attendue ?
Vilain paradoxe, ils se mentent à eux mêmes.
Ils l’ont bel et bien aimée.
A trop jouer, à ne pas l’accepter tel qu’elle est, ils l’ont épuisée.
Un beau jour, elle a pris la tangente sans laisser de traces.
Plus jamais, elle n’a répondu à leurs courriers, leurs cris de désespoir.
C’est ainsi quelle est faite, la Sylvie !
Femme entière, convaincue de lendemains meilleurs.
Plus jamais une Sheng nu (剩女) mais désormais une femme mariée, s’en allant vers un autre destin.
De l’amour entre un homme occidental et une femme chinoise
Juste un chahut.
Au hasard d’une rencontre, un doux sentiment.
Dans la mêlée, des frissons, des sueurs,
Le cœur battant.
Cette fois, Mademoiselle est chinoise.
De Fuzhou, dit-elle.
D’emblée, une question :
Pourquoi son cœur vaut-il mieux que tout l’or du monde ?
Serait-ce son âme ?
Plutôt, ses origines !
Elle porte une part de vérité du grand peuple de Chine.
Solidaire de son incroyable destin, elle rayonne.
Naturellement, elle domine l’arène.
Sa silhouette gracieuse se mouvant élégamment
D’un seul sourire, elle s’impose.
Soudain, un avertissement.
Dans les oreilles, à voix basse,
L’on me dit qu’une relation entre une chinoise et un occidental est de l’ordre de l’impossible.
A l’ordinaire, celle-là est concrète, pragmatique et peu rêveuse.
Jamais s’emballe-t-elle pour de faux plaisirs.
Rarement se tord-t-elle l’esprit en se gonflant d’un sentiment amoureux.
Chez elle tout est plutôt besoin et famille
Elle s’enquiert surtout d’une vie banale et confortable.
De son côté, l’occidental se laisse aller à un imaginaire romanesque.
Il navigue dans ses rêves.
Il croit toujours à sa grandeur passée, donne des leçons à un monde qui ne lui appartient plus.
L’on me dit encore, à la naissance d’un enfant, cette différence devient insurmontable.
La famille chinoise insuffle un air de privation de liberté.
L’homme est alors relégué à un rôle utilitaire, joue profil bas, entre mère et enfant.
Passe sa tête et puis s’en va !
Puissent ces alertes ne pas perturber ma relation naissante, me disais-je alors.
Mais le temps passant, la passion s’étoile.
Un brin d’éclair entre deux contraintes dont il faut parler.
Dès lors, je remarque que notre entente est fragile comme accidentée.
Bientôt laborieuse.
Quelques mots échangés en une journée.
Le fossé culturel m’apparaît plus crûment, plus nettement.
J’ai la curieuse impression qu’il s’élargît avec le temps, rendant illusoire toute communion d’esprit avec elle.
Elle raille mes états d’âme.
Elle boude toute tentative de dialogue.
Chacun campe sur ses positions.
La Chine, la France.
Deux cultures, deux combats.
L’on ne cherche plus à se comprendre.
Surgit l’ennui.
Un silence.
Le vide.
Finalement, nous plongeons dans l’inconnu.
L’histoire banale d’un couple qui se fend.
Une sortie sans gloire.
Un beau bazar pour rien !
De mon côté, je pense toujours à elle.
De son côté, je n’existe plus.
Tout cela est curieux pour moi qui suis tellement attaché à l’histoire passée.
Le cœur bientôt enlacé à un autre homme, elle s’en moque éperdument.
Ah, quel idiot, je fais !
François de la Chevalerie, décembre 2012
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