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Argent Chinois
Deux articles sur cette page :
Et si la chine perdait son triple A ? (les Echos du 29 décembre 2011)
Le riche chinois, colosse aux pieds d’argile
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Et si la chine perdait son triple A ?
Les articles de François de la Chevalerie jùn mǎ 俊 马
La crédibilité d’un pays se mesure aussi à son état sanitaire.
Si l’interminable feuilleton sur la crise de l’endettement nourrit les peurs, depuis ma lucarne chinoise, je m’offre une lecture nuancée.
L’œil rivé sur les comptes, les agences de notation traduisent en termes crus la défiance des investisseurs inquiets devant des accumulations de dette. Sont-elles seulement bien inspirées ? A ne s’en tenir qu’à de seules considérations financières, elles négligent un paramètre, la crédibilité d’un pays se mesure aussi à son état sanitaire.
A contrario, un pays où celui-ci est préoccupant représente un risque élevé. Célébrée pour ses remarquables finances, la République Populaire de Chine mérite un triple A. Mais derrière la manne, une redoutable lézarde trompe cette certitude. A telle enseigne, comment expliquer que nombre de notables et de familles aisées cherchent obstinément à envoyer leurs enfants à l’étranger avec souvent l’objectif d’y acquérir la nationalité ? Comment comprendre le projet de s’établir dans des pays souvent exsangues financièrement ?
La réponse vient de la détérioration de l’environnement en Chine. Celle-ci n’est plus théorique ou sujette à débat. Tel un couperet, elle frappe chaque famille, les hôpitaux débordant de malades. Longtemps beaucoup n’admettaient pas l’origine du mal. Désormais les langues se délient, le ciel sulfureux est pointé du doigt comme ces derniers jours à Pékin.
Sur Weibo, le twitter chinois, plus personne ne croit en rien. Coupables : outre la pollution de l’air, une chaîne alimentaire gorgée de métaux lourds, l’utilisation de produits dangereux dans l’habitat, le tout augmenté par la passivité des autorités locales. Les journaux chinois foisonnent d’incidents sanitaires.
Tel jour du mercure détecté dans une boisson gazeuse tel autre de la mélamine dans du concentré de protéine de riz. Certes les autorités sont conscientes de la situation mais elles hésitent à prendre des décisions qui compliqueraient l’indispensable relèvement du niveau de vie d’une partie de la population toujours déshéritée. Déjà bousculée par les conséquences de la décélération de la croissante mondiale, celle-ci est à cran.
Du coup, les autorités privilégient les effets d’annonce. Ici, une charte environnementale pour les entreprises exportatrices.
Là, la construction d’Eco villes. Souvent des trompes l’œil. Elles restent timorées car le coût du nettoyage en règle de la Chine serait astronomique. Pire ! Elles tolèrent l’impensable comme l’autorisation récemment donnée par le Ministère de la Santé de la présence du staphylocoque doré dans des produits congelés de consommation courante, comme le riz ou la pâte à cuire. Ainsi la facture de l’endettement sanitaire s’aggravera encore pour les générations futures.
Quoi de plus normal alors que des chinois cherchent dans un instinct de survie à s’en échapper ? Pourquoi leurs enfants devraient-ils payer (de leur santé) ce dont ils ne sont pas responsables ?
Cette question devrait nourrir la réflexion des agences de notation. Alors que cet Eté, tout le monde prédisait le pire concernant l’abaissement de la note des Etats Unis, ce pays emprunte aujourd’hui à des taux bas. Les investisseurs n’auraient-ils pas reconnu que, tout compte fait, les Etats Unis proposeraient un environnement sain ? Si donc l’Europe prenait le chemin d’un renforcement de ses institutions vers plus de démocratie et d’efficacité, ajouté à cela une nature plutôt protégée, plus rien ne devrait incommoder des investisseurs par trop pusillanimes.
Et si ces derniers se font encore tirer l’oreille, un indice devrait attirer leur attention. Même si les comptes de leur pays battent de l’aile, rares sont les européens qui envisagent de plier bagage. Malgré tout, se maintient dans les esprits l’idée que l’Etat de Droit existe, que la contestation démocratique est possible et surtout qu’il y fait plutôt bon vivre.
Le riche chinois, colosse aux pieds d’argile
Les récits de jùn mǎ 俊 马 (François de la Chevalerie)
Naguère, la ruée vers l’or suscitait des vocations d’aventuriers.
L’on s’en allait vers le Klondike ou en Californie, la gorge assoiffée.
Aujourd’hui, la belle est un individu en chair et en os.
Généralement un homme, indiscernable parmi des milliards d’habitants, le plus souvent sorti du rang.
Riche et chinois, de son état.
Valse entre ses mains des milliards de yuans dont beaucoup pourraient servir à renflouer les caisses d’entreprises aux comptes chancelants, plus encore les économies de pays gangrenés par les dettes.
Comme il prospère, plus d’un fait les yeux doux à ca cagnotte.
Une richesse acquise en un éclair de temps
A l’origine de toute richesse, existe un trouble, un doute.
Cette affirmation est valable partout mais en Chine, toute richesse éclot obligatoirement à l’ombre d’un Guangxi.
Réseau local d’intérêt et d’échange de services, le Guangxi fait partie de l’histoire non dite de la Chine.
Par delà les révolutions, les régîmes autoritaires, la vague de développement depuis les années 80, il s’est maintenu intact, presque indélébile.
S’il faut retenir un seul mot de la langue chinoise, ce serait celui-ci car à bien des égards il structure toujours les relations d’affaire en Chine.
Le Guangxi est une mallette de travail bien utile.
Il ouvre droit à des passes droits, des autorisations, toutes facilités grâce auxquelles l’argent glisse à flot des uns aux autres selon des règles arbitraires et aléatoires, toujours sous le manteau de la discrétion.
L’immobilier est sa Terre d’accueil naturel.
En raison de l’énormité des besoins en construction en Chine depuis trente ans, il se prêtait merveilleusement à des arrangements de toutes sortes, entre autres, des terrains concédés à des conditions préférentielles, des permis de construire obtenus à la vite.
Le riche en nombre
Depuis trente ans, la chine s’est peuplé de riches à un rythme sans précédant.
Il s’en compterait par dizaines de milliers dont 80 % n’avaient voici trente ans qu’une gamelle pour toute richesse.
Si les principales métropoles en regorgent, chaque ville a le sien, souvent l’heureux prête-nom d’une myriade d’affaires soutenues par les autorités locales.
Le riche chinois a le sommeil léger.
Malgré l’étonnante croissance chinoise, l’homme est inquiet.
Comme tous ses pairs de par le monde, pour maintenir ou renforcer ses avoirs, il doit constamment diversifier ses investissements, penser l’au delà.
En Chine, par les temps qui courent, l’exercice est hasardeux.
Périlleux est de poursuivre des acquisitions dans l’immobilier alors que le marché s’essouffle. Obsédées par le maintien d’un taux de croissance élevé, les autorités ont longtemps favorisé ce secteur jusqu’à l’hypertrophier. Résultat, de nombreux programmes ne trouvent pas de preneurs. Dans de nombreuses villes secondaires, les prix dévissent.
Le croissance par absorption comme le rachat d’entreprise est un exercice aussi délicat compte tenu de la faiblesse d’informations précises sur les comptes des sociétés chinoises.
A défaut, il cherchera s’émanciper de son Guangxi qui lui ponctionne à l’avenant de belles sommes. Mais attention, le centralisme démocratique est toujours de mise en Chine ! A tout moment, on peut lui reprendre d’un coup ce qu’il a mis vingt ans à engranger, ce d’autant plus s’il s’agit d’une richesse à l’origine trouble, où se mêlent historiquement des intérêts croisés.
Le rêve de ses nuits
Dans ses nuits, le riche chinois rêve de toutes ses forces d’un monde ailleurs où son or sera tout en partie préservé.
Il rêve pour lui, pour les siens, plaide pour son seul intérêt personnel.
Quelques arpents de terre dans un pays où l’état de Droit existe lui convient bien.
Son enfant unique est souvent la pointe avancée de ce projet.
Il l’envoie en éclaireur dans une université australienne, américaine ou canadienne avec l’espoir qu’il recueille un diplôme et qu’il acquière une autre nationalité.
L’opération lancée, il achète au comptant un appartement à Vancouver ou à Brisbane.
Puis deux ou trois, terrant peu à peu son argent.
Il poursuivra encore l’idée d’introduire sa société sur une bourse occidentale, généralement New York alors même qu’il méconnaît la valeur de celle-ci en Chine.
Le tout sécurisé, il ausculte le marché à la recherche d’opportunités. Si peu aventurier, pusillanime et conservateur, il s’intéressera à du solide, en prenant peu de risques.
Moralité : il faut lui tailler un costard à la mesure de ses epaules, son désir de durer dans le temps, dans un Etat de Droit.
Lexique de riches pour les riches
abondant / riche yù 裕
riche / abondant fù 富
rafiné / riche shān 赡 富翁
fertile / riche / abondant wǔ 膴
riche / aisé fù yù 富裕
riche / opulent kuò chuò 阔绰
riche / abondant fù ráo 富饶
riche / abondant fēng fù 丰富
riche et généreux fēng hòu 丰厚
riche et puissant fù qiang 富强
riche / gros richard / nabab fù háo 富豪
riche / abondant / cossu / opulent fù zú 富足
devenir subitement riche bào fā 暴发
propriétaire de biens / riche / richard cái zhu 财主
riche en / bien pourvu de / bien muni de fù yǒu 富有
servir un personnage riche et puissant par un ouvrage littéraire bāng xián 帮闲
parvenu / nouveau riche bào fā hù 暴发户
riche collection d’objets d’art lín láng mǎn mù 琳琅满目
être un homme de ressources / être riche en idées / avoir plusieurs cordes à son arc (Chengyu) zú zhì duō móu 足智多谋
fils de famille soucieux de ses habits de soie / jeune homme de famille riche / gandin / jeune dandy wán kù zǐ dì 纨绔子弟
pays vaste et riche en ressources naturelles / pays au vaste territoire et aux abondantes richesses dì dà wù bó 地大物博
Guanxi 关系
Par exemple, guan xin 关心 veut dire « se soucier de », guan hai 关怀 veut dire « montrer de la sollicitude envers quelqu’un » et guan zhao 关照 veut dire «prendre soin de» ou «informer».
Xi veut dire « attacher » ou liaisons, comme dans les relations de parenté (shi xi 世系) ou la parenté en ligne directe (zhi xi qin shu 直系亲属). Cela implique déjà l’idée de hiérarchie et de formalisation. Xi exprime également le maintien des relations à long-terme. Par exemple, wei xi 维系veut dire «maintenir».
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